Je ne suis pas un héros
Tu n’es pas un héros.
Tu n’es pas né de l’union d’un Dieu et d’une mortelle.
Tu n’es pas Ulysse, tu n’es pas Jeanne d’Arc, tu n’es ni Lucie Aubrac, ni Jean Moulin. Tu ne ressembles pas à Jean Valjean, point d’analogie avec Don Quichotte, tu n’as pas le courage de Martin Luther King ou de Mandela.
Un Superhéros ? On s’éloigne encore. Tu n’as pas de pouvoirs surnaturels. Tu n’es pas Hercule : tu es mortel, tu subis le vieillissement, tu es bien incapable de soulever 100 tonnes. Rien de commun non plus avec Superman ou Super Jaimie.
Et pourtant tu es bien le “héros“ d’une œuvre, d’une fiction ou d’un récit. Tu n’as rien revendiqué, tu n’as pas cherché ce statut de “héros“ et tu te retrouves là, au centre, sous les projecteurs.
Tu es juste le protagoniste d’une histoire, tu n’y es pour rien. Et pourtant tu suscites une certaine admiration comme chez un personnage de Woody Allen. Parfois également, tu pousses le vice et tu prends carrément le contre-pied : tu es diabolique, alcoolique ou peu empathique.
On t’appelle souvent anti-héros et curieusement, on s’attache à toi. Peut-être parce que tu nous ressembles. Tu as des failles. Tes faux pas te collent à la peau…
Tu n’as pas eu de chance dans la vie, tu es souvent issu d’une classe populaire, comme souvent dans les romans réalistes du XIXe. Tu es Gervaise dans L’Assommoir, tu es Nana dans notre Rue Blondel.
Tu n’es pas un héros, tu t’es juste trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment. Et pourtant souvent tu t’es battu, tu as survécu mais personne ne voit tes cicatrices. Balthasar dans Murmures de glace rentre chez lui après avoir combattu, après la captivité. Personne pour le comprendre. Il est seul avec ses “actes héroïques“.
« Je ne suis pas un héros » se défend Erwan Larher dans son témoignage si juste de sa présence au Bataclan dans Le Livre que je ne voulais pas écrire. Il lui tient en revanche à cœur de nous décrire dans un passage d’une douceur extrême l’intervention de SON héros, un pompier, héros au quotidien, qui lui apparait tel un ange. Le héros est évidemment une question de point de vue
Une infirmière, ton père, ta grande sœur, un chercheur en médecine, une femme qui retire son voile en Iran, un étudiant devant un char. Bien loin du héros du Moyen-âge, le héros moderne est finalement souvent ce “héros malgré lui“ qui nous touche tant.